Enigme n°8
Faux Bruit.
Un vrai foutoir ! Cest ce qui arrive quand les choses sont mal emmanchées. Lorsquune opération, quelle que soit sa nature, foire au départ, soyez convaincus que la suite ne peut quempirer. Une pagaille monstre régnait dans lappartement de monsieur Lentendu au deuxième étage dun immeuble résidentiel au centre de Grenoble. Grenoble la ville blanche, non pas à cause de la neige car cette année elle refusait de tomber mais à cause de cette saloperie de poudre blanche qui pullulait en ville et qui détruisait tant de pauvres êtres égarés. Si la neige se faisait désirer, la pluie quant à elle ne cessait de tomber depuis octobre. Ceci ajouté à cela ne pouvait quaccentuer la mauvaise humeur du divisionnaire Blondel qui affichait ce jour là sa tête des mauvais jours. Quand au juge Aubier, nen parlons pas ce nest pas une tête quil montrait mais le masque le plus calamiteux qui puisse exister sur ce qui lui servait de tête. Suite à une information communiquée par un indic, la brigade des stups avait monté une souricière qui ne donna rien mais par contre, mobilisa inutilement beaucoup de policiers dans un secteur de Grenoble. Conséquence des plus déplorables. La transaction dont ils furent témoins concernait la vente dun poste de télévision. Tout à fait par hasard, un autre policier en congés, assistait lui à la vraie transaction à une autre extrémité de Grenoble. Seul il ne put intervenir et se contenta de le signaler à ses supérieurs qui déclenchèrent aussitôt cette perquisition musclée dans lappartement de Lentendu. Perquisition elle aussi vouée à léchec, car malgré lampleur des effectifs qui passaient au peigne fin lappartement, rien de suspect nétait découvert après 3 heures de recherches minutieuses. Blondel sopposait fermement à lutilisation des indics pour diverses raisons. Soit la police se voit contrainte doffrir des compensations ou des arrangements illégaux à lindic, soit elle lui fait courir de graves risques pouvant mettre sa vie en danger. Lorsque lont met le doigt dans lengrenages des compromissions, on ne sait plus jusquoù cela peut mener. La brigade des Stups, navait cure des recommandations de Blondel et ce point venait chatouiller un peu plus sa mauvaise humeur.
Une épaisse couche de détritus provenant des matelas, coussins et oreillers que les policiers avaient éventrés jonchaient le sol. Dautres policiers sondaient les cloisons, démontaient les sanitaires les machines, les meubles et tout ce qui était susceptible de posséder des doubles cloisons, en vain. Lavocat de monsieur Lentendu, notait scrupuleusement tous les dégâts faits et prenaient de temps à autre des photos.
- Je crois que cette opération va coûter cher à la police, fit-il dun ton ironique au divisionnaire. Sans compter évidemment les dommages et intérêts que nous allons réclamer et croyez moi, je ne vais pas y aller avec le dos de la cuillère.
Près de la porte, un policier interpella une adolescente.
- Mademoiselle, vous ne pouvez pas venir ici, fit-il à la jeune fille.
- Laisse Marcel ! Intervint son collègue, cest la fille de Blondel, elle vient voir son père.
- Ah ! Excuse moi, je ne savais pas.
- Tu nes pas excusé mon vieux, tu fais partie des rares terriens qui ne connaissent pas Anaïs Blondel. Tu mérites un blâme.
Anaïs savança vers son père.
- Papa, tu peux me ramener ? Il pleut à torrent, je ne veux pas rentrer à pieds.
- Mille regrets, je ne peux pas. Demande à Marini. En ce moment il fouille la cuisine avec ses collègues.
Dans la cuisine, un tout autre spectacle attendait Anaïs. Alors que les inspecteurs Danielle Grubat et Jean Marie Poiret faisaient consciencieusement leur travail, Marini et son ancien équipier Merlan faisaient la fête. Avec des cuillers en bois, Merlan tapait sur des fonds de gamelles, alors que Marini, jouait des maracas avec des boites de conserve en chantant la célèbre chanson créole : Baméa tibo, deux tibo, trois tibo doux doux .
- Tiens ! Voilà la musicienne qui nous manquait, salua par ces mots Marini, larrivée de la jeune fille.
Après avoir salué tout le monde, elle accompagna Danielle dans ses recherches en échangeant de temps à autres quelques mots sur le déroulement de la perquisition. Elle navait encore jamais assisté à une perquisition dune telle importance et la fouille des policiers lintéressait.
Du bout de la pièce Marini linterpella de nouveau.
- Laisse tomber Anaïs, vient plutôt jouer avec nous. Je tinvite dans mon orchestre.
Il plongea dans un élément de cuisine, en retira deux boites de conserves de petits pois et les jeta à Anaïs.
- Allez Anaïs, joue avec nous.
Elle ne se fit pas prier, pensant quun peu de mouvements la réchaufferait. Joyeuse elle secouait ses deux boites dans le rythme donné par Emile tout en laccompagnant de la voix. La fête durait depuis un quart dheure lorsque son père fit irruption dans la pièce, furieux comme jamais elle ne lavait vu.
- Arrêtez vos singeries ! Ce nest pas le moment. Marini ! Je vous attends en début daprès midi dans mon bureau jai deux mots à vous dire. En attendant ramenez Anaïs à la maison et ne mettez plus les pieds ici.
Linspecteur posa à regrets ses boites et savança en maugréant vers la porte.
- Pour une fois quon samuse. Y a toujours des empêcheurs de tourner en rond pour vous mettre des bâtons dans les roues. Parce quon est blanc on na pas le droit de chanter. Tous des racistes.
Ses collègues pouffèrent de rire à létouffé devant les propos irrespectueux dEmile. Chacun savait quil se permettait beaucoup de libertés et peut-être abusait un peu trop de létat de grâce dans lequel le couvait Blondel. Anaïs sapprocha de son père.
- Dis papa, tu nes pas fâché. Tu ne feras pas de reproches à mon ami.
- Ah ! Tu crois ? Tu penses peut-être que je vais laisser passer ça sans rien dire. Le moment nest pas approprié. Oh ! Pas du tout.
- Bon ! Puisquil en est ainsi. Je ne te dirai pas où la drogue est cachée. Tant pis pour toi.
Surpris, le divisionnaire sursauta. Marini fit demi tour, empoigna Anaïs sous les aisselles et la souleva en la faisant virevolter.
- Jespère que tu vas pas dire à ce vilain monsieur où elle est. Ne le dis quà ton ami et des amis, ten as quun. Cest Emile.
Anaïs prit loreille de linspecteur dans sa main et lui murmura quelque chose.
Radieux, Emile la fit de nouveau tournoyer dans les airs.
- Bravo Anaïs ! Tu es une championne. Elle a trouvé, se mit-il à crier.
Blondel encaissa le coup, sortit de la cuisine et interpella les policiers.
- Vous pouvez arrêter vos recherches. On a trouvé.
Un grand hourra salua sa déclaration. Le juge sapprocha de lui.
- Ah ! Où est-elle ? Puis-je la voir ?
- Moi, jen sais rien, faudra demander à Anaïs.
Fin.
Anaïs Blondel Echirolles le 7 janvier 2001 Alors, vous avez trouvé ?
Salut ! A bientôt pour une autre énigme.