Enigme n°15

Vol mystérieux

Nous sommes partis très tôt ce matin pour visiter le musée de Bayard à Pontcharra. Ce jour là d’autres visites étaient programmées ce qui posa un problème au conservateur. Un car de visiteurs Belges était attendu pour 9 heures ce qui nous obligea à partir à 7 heures afin d’être à Pontcharra à 8 heures. Cette bourgade n’est qu’à 60 kilomètres de Grenoble et le parcours se fait en moins d’une heure par l’autoroute. Le musée se trouve dans le château bâti sur une colline au dessus de Pontcharra face à la vallée du Grésivaudan.

Bien sûr notre arrivée matinale provoquait quelques désagréments à une heure où le personnel s’affaire à des tâches de nettoyage ou de rangements. Dans le hall d’accueil une femme de ménage passait la serpillière et notre présence la mit de mauvaises humeur. Elle ronchonnait sans cesse comme un roquet prêt à mordre.

Nous avons tout d’abord regardé une vidéo retraçant la vie de Bayard et relatant ses 6 campagnes d’Italie où il se fit remarquer par sa vaillance et sa droiture. Puis nous avons écouté le conservateur nous parler du château, de la vie du chevalier sans peur et sans reproches. Récit qu’il agrémenta d’anecdotes pour mieux souligner les qualités de ce valeureux chevalier qui n’était pas seulement un grand soldat mais aussi le défenseur des faibles, imposant à son armée le respect des femmes et des enfants, coutume n’ayant pas rigueur à cette époque, quoique de nos jours ça ne s’améliore pas.

Dans une autre salle, la salle d’exposition, le conservateur après nous avoir invités à le suivre, ouvrit le pupitre des précieuses reliques pour nous montrer des objets ayant appartenu à Bayard. Ils reposaient soigneusement rangés dans des écrins étiquetés comme par exemple son célèbre béret orné d’un écusson frappé d’une étoile. Une grande variétés de témoignages de l’époque ornaient cette vitrine : des clefs, vases, peintures et d’autres écussons et parmi eux, l’un en or massif, gravé à son effigie, avec la célèbre mention "  SANS PEUR ET SANS REPROCHES " qui lui fut offert par François 1er en hommage à ses victoires en Italie et surtout au siège de Mézières où il sauva la France d’une invasion. Monsieur le conservateur dans un sourire complice nous avoua que ce dernier détail n’était pas officiellement confirmé par les historiens. Puis nous avons admiré les armures de l’époque de la chevalerie, les armes des seigneurs et chevaliers. Autant de magnifiques objets exposés. Toute la classe s’était disséminée autour de ces merveilles du passé et par la même occasion commençait à se dissiper. A côté des armures Mario et Pierrot s’affrontaient en duel. Solange mimait une vieille dame filant la laine près d’un rouet et d’autres se chamaillaient sur des thèmes inspirés de l’époque. Un des plus sages, Sergio, penché sur le seau de la femme de ménage avait trouvé un sujet de conversation avec la brave dame qui n’en continuait pas moins de pousser sa serpillière. Il semblait moins excité que ses camarades, peut être parcequ’il connaissait bien le musée pour l’avoir déjà visité avec ses parents. Dans un coin de la pièce monsieur le conservateur répondait aux questions de monsieur Barino notre professeur d’histoire, avide de connaissances et toujours à la recherche de détails historiques. Nous étions tous enchantés de cette petite incursion dans notre passé historique, malheureusement, tout à une fin. Par la grande porte vitrée nous vîmes le car des Belges arriver. Une hôtesse les accueillit et les conduisit dans la salle de projections voisine pour visionner les vidéos.

Monsieur Barino sonna le rassemblement alors que monsieur le conservateur se dirigeait vers le pupitre pour en verrouiller la vitre. Nous étions dans le hall d’accueil, prêts à sortir lorsque soudain un cri nous fit sursauter.

- Le médaillon de Bayard ! On a volé le médaillon ! hurlait le conservateur le visage rouge de colère. Ce ne peut être qu’un élèves, il y était tout à l’heure.

Barino furieux nous invectiva.

- Que celui qui a volé le médaillon le rende de suite. Ce vol aura de graves conséquences. Je ne veux pas de voleur dans ma classe.

Nous étions catastrophés. Comment l’un de nous pouvait-il se permettre une telle monstruosité en dérobant un objet peut-être sans grande valeur marchande mais par contre d’une valeur historique inestimable, surtout pour notre région. Les questions du conservateur et de notre professeur n’engendraient que des réponses négatives.

En attendant l’arrivée des gendarmes on nous enferma dans une pièce, surveillés par plusieurs personnes du musée et de monsieur Barino. Quelques minutes plus tard les gendarmes débarquaient.

Ils nous divisèrent en deux groupes, les filles dans une pièce, les garçons dans une autre. Une gendarmette faisait déshabiller les filles une par une et deux gendarmes les garçons. Mais de médaillon, point de trouvé. Les fouilles terminées, ils nous rassemblèrent dans le hall en attendant la décision du lieutenant de gendarmerie.

Sortant de la salle d’exposition un gendarme tendit un papier au lieutenant qui lut à haute voix : " Le médaillon sera rendu demain matin. C’était un jeu. Plus fort qu’Arsène Lupin ". 

- Si c’est une plaisanterie, elle va coûter cher à son auteur, déclara le lieutenant d’un ton sévère. Mais j’aimerais bien comprendre comment il s’y est pris.

Il nous toisait d’un œil méchant soupçonnant le malfaiteur de vouloir ridiculiser la gendarmerie.

La femme de ménage furieuse donnait un nouveau coup de serpillière sur les dalles du hall, en tempêtant comme un beau diable contre nous. Puis elle s’arrêta, observant la scène les deux mains sur les hanches.

Sergio, toujours serviable s’excusa en notre nom du dérangement que nous lui apportions et s’offrit à l’aider, alors que de nouveau mes camarades recommençaient leur cirque habituel, excités par cette situation surprenante qui les confrontait aux gendarmes. Quelques uns parmi nous déploraient cet événement alors que d’autres en riaient. La consternation des gendarmes due à l’échec des fouilles y étant certainement pour quelque chose.

Quant à Sergio il effectuait sa BA matinale en proposant à la femme de ménage pour nous faire pardonner d’aller vider le seau d’eau sale sur la grille de l’égout à l’extérieur. Et le voici parti tout souriant avec son seau à la main. Les Belges sortaient de la salle de vidéo pour pénétrer dans la salle d’exposition, provoquant une petite bousculade dans le hall surchargé . Le lieutenant après avoir téléphoné à son chef nous apostropha d’un ton courroucé.

- Vous pouvez partir. Mais vous restez à la disposition de la gendarmerie tant que le médaillon ne sera pas retrouvé. Nous reprendrons les interrogatoires demain à l’école, soit nous, soit les gendarmes de Grenoble. Voler un objet historique, c’est une honte.

Dans le car, sur le chemin du retour, nous eûmes droit à un sermon de Barino furieux comme nous ne l’avions encore jamais vu.

Le lendemain matin on découvrit le médaillon dans une enveloppe du courrier au commissariat central accompagné d’une carte sur laquelle était écrit  : " Avec les compliments d’Arsène Lupin ".

Fin

Comment s’y est pris le voleur ? (plus exactement le farceur).

Anaïs Blondel Echirolles le 11Fevrier 2003

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Salut ! A bientôt pour une autre énigme.